Des pas dans la neige, Maryse Letarte à la PdA – Discrètement féérique (Sylvain Cormier, Le Devoir)

Logo Le DevoirPour tout décor dans cette Cinquième salle si froide et si peu magique, un ciel d’ampoules en guise d’étoiles, qui scintillaient au besoin. En supplément, Maryse Letarte elle-même servait d’élément mobile, sa robe metal flake argentée miroitant sous les faisceaux d’Alain Lortie. Il ne fallait pas plus pour évoquer l’enchantement feutré, la discrète féérie de l’album Des pas dans la neige: d’entrée de jeu, nous étions dans un autre monde. Son monde.

Enfin. Il y a déjà trois Noëls que nous le chérissons, cet album pas ordinaire de chansons d’hiver et des Fêtes: nous sommes au moins 25 000 à travers le monde, phénoménal succès pour un disque sans le moindre classique saisonnier, entièrement écrit et composé par la jeune femme. Cette première du spectacle de l’album aurait dû avoir lieu en 2008, seulement voilà: en plus d’accoucher de son plus beau disque en carrière, Maryse Letarte a eu un bébé, et ce fut son Noël à elle, d’où délai.

D’où fébrilité, aussi: allions-nous être encore là, encore sous le charme? Pas de souci: nous étions plus ravis encore que nous l’aurions été en 2008, les chansons plus nôtres encore. Sur scène, les arrangements étaient plus exquis, plus fragiles aussi, bijoux si finement sertis que Maryse et les siens (Amélie Mandeville, Marc Papillon-Ferland, Marc-Antoine Olivier, Justin Allard et Christine Giguère) semblaient craindre d’en briser les attaches. Délicatesse partout.

Violoncelle et violon, claviers, xylophone, percussions délicates, bruits singuliers (une sorte de concerto pour essoreuse à salade, notamment), on n’était pas loin de la parfaite pop sixties du Pet Sounds des Beach Boys, pas loin non plus du jazz, du prog, de la musique contemporaine. L’apparente simplicité des airs tenait en équilibre (parfois précaire) sur le fil d’une mécanique chansonnière complexe, cascade d’accords majeurs déboulant en accords mineurs et vice et versa: elle n’a pas froid aux doigts, Maryse, derrière sa petite voix. Accessibilité et richesse à la même enseigne.

Les chansons de l’album Ni le feu, ni le vent (paru en 2010) et celles de l’album Des pas dans la neige se répondaient comme les deux faces de la même planète, côté sombre et côté lumineux de la même Maryse Letarte: c’est dire à quel point son album de Noël n’en est pas un au sens banal du terme, mais bien la suite naturelle d’une oeuvre cohérente et sensible. De grâce, remplissez-lui la Cinquième salle jusqu’au 23 décembre. Des fois que ça lui donnerait envie d’un volume 2.

Sylvain Cormier, Le Devoir

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Chanson – NI LE FEU, NI LE VENT (Sylvain Cormier, Le Devoir)

Logo Le DevoirÀ ceux qui ont attrapé le traîneau en chemin — vous avez été 20 000 à vous procurer Des pas dans la neige, ce disque de Noël qui n’en était pas un —, voici l’occasion de confirmer l’impression: oui, tout ce qu’enregistre Maryse Letarte est à chérir.

Et c’est vrai depuis les années 1990: cinq albums témoignent de cette élégance dans la manière, cette transparence dans l’expression. La jeune femme n’en finit plus d’affiner son art, qui est complexe, mine de rien: un art de l’épuration, de la clarté, de la beauté à petites touches, ici des vents et des cordes idéalement servies, des mélodies aux détours ravissants et heureux. Elle sait ce qu’elle fait, fait presque tout, et tout bien: réalisation, arrangements (à la Bacharach, souvent), prise de son, l’essentiel de l’instrumentation. Tout sans forcer. Elle nous amène chez elle comme un disque y parvient rarement: émois, naufrages, douces euphories, tout est là. En spectacle à La Tulipe ce mardi.

Sylvain Cormier, Le Devoir

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