Sept ans après Des pas dans la neige, un mémorable album de Noël, l’auteure-compositrice-interprète Maryse Letarte retente l’expérience avec La Parade, un nouvel album à paraître le 27 novembre prochain.
La chanteuse folk de Saint-Hyacinthe avait réussi tout un exploit en 2008 en proposant un album de Noël composé uniquement de chansons originales. Certaines chansons avaient réussi, en peu de temps, à devenir des quasi-classiques du temps des fêtes québécois (notamment Boom Boom).
La Maskoutaine, active depuis plus de 15 ans sur la scène musicale de la province, n’avait cependant pas dit son dernier mot. Dans le même genre, La Parade promet des «angles nouveaux» aux éternels sujets du temps des fêtes : le bonheur de donner, les plaisirs de l’attente et de l’anticipation, l’effervescence provoquée…
La petite histoire/anecdote derrière l’album : «Parmi les nombreux instruments joués par Maryse, mentionnons son piano d’enfance, enregistré pour l’occasion dans le sous-sol chez sa mère. Et voilà qu’un soir sa petite Stella, âgée de quatre ans et demi, descend la rejoindre et s’installe pour pianoter… comme maman! Souhaitant immortaliser ce souvenir personnel, Maryse enregistre la « performance » enfantine de Stella, moment aussi inattendu que réjouissant. Quelques jours plus tard, après réécoute, elle décide d’en insérer quelques fragments sur le premier extrait du disque, la chanson La parade, lui donnant une signification toute spéciale…»
Bref, Letarte arrive juste à temps avec une dose de réconfort. Dévoilée cet après-midi sur le site de la chanteuse, la pièce-titre est le premier extrait de l’album.
Son quatrième album Ni le feu, ni le vent relève du petit exploit. Au-delà de ses talents indéniables d’auteure-compositrice, Maryse Letarte se démarque en tant qu’arrangeuse hors pair, conférant à ses douces dentelles romantiques et éthérées au piano des airs de films d’amour de Claude Lelouch, avec ses cuivres, flûtes, hautbois et cordes qui bercent majestueusement l’opus. Ce concert, il avait été prévu pour décembre 2010, puis reporté un an plus tard en raison de l’arrivée dans la vie de Letarte de Stella, son grand bonheur de petite fille. Il va sans dire qu’on l’attend de pied ferme. Le 2 décembre au cabaret La Basoche.
Guillaume Moffet, VOIR
Maryse Letarte nous propose Ni le feu, ni le vent, un exercice d’écriture intimiste qui ne se veut pas racoleur. Tout s’y expose en musique et devient translucide.
Elle est enceinte jusqu’aux oreilles, mais ne sautez pas trop vite aux conclusions. Lorsque vous écouterez la chanson Petit Homme, dites-vous bien que c’est plutôt une fille (Stella) que Maryse Letarte attend avec impatience. “Je sais que vous n’êtes pas très people au Voir, mais je te le dis quand même. En fait, j’ai écrit ce texte pour ma soeur qui a eu un garçon. Je le lui avais lu en présence de la famille. Tout le monde était bien ému, et c’est ce que je voulais! Je l’ai repris pour en faire une chanson, en enlevant quelques passages, car le poème était beaucoup plus long.”
C’est bien à l’image de l’auteure-compositrice-interprète, qui semble toujours prendre en note dans son carnet personnel les beautés et les aléas de la vie. Une forme d’introspection lucide qui, sur une chanson comme Non merci, n’emprunte pas quatre chemins pour résumer l’amour. Des temps d’arrêt qui prennent la forme de miniatures musicales salvatrices. Sur son nouvel album intitulé Ni le feu, ni le vent, mixé par Erwin Autrique (Keren Ann et Benjamin Biolay), sa démarche musicale prend des teintes impressionnistes. Aux cordes (violon, violoncelle) s’additionnent la flûte traversière, le flugelhorn ou le hautbois. Avec le piano qui trône au centre, cette instrumentation nous dévoile un souci du détail presque pointilliste.
Quelques thèmes semblent chers à l’auteure, dont cette réalité qui s’impose parfois comme un mirage qu’on ne voudrait pas remettre en question. “Tu dois penser à Icône, j’imagine. Ça remonte à l’adolescence. On se convainc que ce sera génial de voler de ses propres ailes, on veut que ça arrive le plus vite possible, ça motive notre élan. Rendu là, tu te rends bien compte que c’est très différent de ce que tu pouvais imaginer. Moi, ce fut par rapport à la musique. À l’époque, il y avait cet homme qui m’influençait beaucoup. Ce qui m’a inspiré cette chanson, c’est quand je l’ai rencontré pour de vrai, dans sa réalité. Une personne ordinaire, qui vit en retrait, désillusionnée par l’industrie de la musique. Pour moi, c’était tout autre chose comme vie. Mais il faut voir cette chanson comme une forme d’hommage aussi”, un hommage à un destinataire dont elle préfère taire l’identité.
Le même exercice s’expose avec J’en sais peu ou prou de la réalité, je peux toujours rêver, je ne te reconnais plus du tout, une chanson qui rivalise pour une place en tête du palmarès des titres les plus longs. “Cette fois-ci, c’est plus personnel, précise-t-elle. Il arrive un moment dans un couple où l’autre avec qui tu partages ta vie se dévoile à toi sous un tout autre jour. Tu te crées une image, une idée sur sa personnalité, et tout d’un coup tu constates que ce n’est plus vrai. Tu restes adulte, il ne s’agit pas d’un psychodrame hystérique. Tu en discutes, mais c’est tout de même un choc. On pense connaître quelqu’un, mais en réalité on extrapole.”
Tout ça est chanté avec cette voix atypique et parfois vulnérable qui laisse de côté les artifices. Celle qui se considère avant tout comme une arrangeuse de musique cultive une esthétique bien singulière qu’on aurait du mal à comparer à celle de Coeur de pirate. “On peut faire de la musique romantique sans que ce soit sirupeux, indique-t-elle. Il y en a pour qui des chansons romantiques, où l’émotion est importante, c’est impossible. Ils ne veulent pas toucher à ça. Ils pensent au cliché amour-tendresse, mais ce n’est pas que ça! C’est un art de jouer avec l’émotion. C’est bien le fun des guitares électriques et une voix qui écorchent, mais souvent ce n’est qu’une façade. Tu peux aussi écrire un texte abstrait, où personne ne saura de quoi tu parles; c’est sûr que tu ne te feras pas niaiser. Quand j’écris, je reconnais les limites de ce qui pourrait rendre un texte mièvre. Ces émotions, je les assume.”
À écouter si vous aimez /
Keren Ann, Andrea Lindsay, Lykke Li
Antoine Léveillée, VOIR